Le moment cinétique est une grandeur fondamentale en mécanique. Il joue un rôle important notamment dans les systèmes en rotation. Le théorème du moment cinétique découle directement du principe fondamental de la dynamique et, par conséquent, ne possède pas plus d'information. En revanche il permet de dégager rapidement une intégrale première du mouvement dans le cas des systèmes à force centrale par exemple.
Moment d'une force
Définitions
Considérons une force \(\overrightarrow{f}\) qui s'applique en un point M. Par définition, le moment \(\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}(\overrightarrow{f})\) de la force \(\overrightarrow{f}\) en un point A est le vecteur
Moment d'une force en un point
\[ \overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}(\overrightarrow{f})\stackrel{\text{def}}= \overrightarrow{\text{AM}}\wedge\overrightarrow{f} \]Le moment d'une force s'exprime en N.m.
Supposons un système soumis à \(N\) forces \(\overrightarrow{f_{i}}\) dont les droites d'action passent par le même point A. On dit que les forces sont concourantes en A. Dans ce cas, le moment des forces en A est nécessairement nul puisque \[ \overrightarrow{\text{AM}_{i}}// \overrightarrow{f_{i}} \qquad\Longrightarrow\qquad \sum_{i}\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}(\overrightarrow{f_{i}})=\overrightarrow{0} \] Plus intéressante est la propriété selon laquelle les actions mécaniques sont équivalentes, dans ce cas, à une seule force \(\overrightarrow{F}=\sum\overrightarrow{f_{i}}\) appliquée en A. En effet, les forces étant concourantes en A, on peut écrire \(\overrightarrow{f_{i}}=k_{i}\overrightarrow{\text{AM}_{i}}\) avec \(k_{i}\) un réel. Le moment des forces calculé en un point O quelconque vaut alors
\[\begin{array}{ccc} \displaystyle{\sum_{i=1}^{N}\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{O}}}(\overrightarrow{f_{i}}) } & = &\displaystyle{\sum_{i}^{N}\overrightarrow{\text{OM}_i}\wedge k_{i}\overrightarrow{\text{AM}_{i}} } \\ & = &\displaystyle{\sum_{i}^{N}\overrightarrow{\text{OA}}\wedge k_{i}\overrightarrow{\text{AM}_{i}} } \\ & = &\displaystyle{\overrightarrow{\text{OA}}\wedge \sum_{i}^{N}k_{i}\overrightarrow{\text{AM}_{i}}}\\ & = &\displaystyle{\overrightarrow{\text{OA}}\wedge \sum_{i}^{N}\overrightarrow{f_{i}} } \\ \displaystyle{\sum_{i=1}^{N}\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{O}}}(\overrightarrow{f_{i}}) } & = & \displaystyle{\overrightarrow{\text{OA}}\wedge \overrightarrow{F}\quad \forall \text{O}} \end{array}\]À retenir
\(N\) forces concourantes en A se comportent comme une seule force \(\overrightarrow{F}=\sum\overrightarrow{f_{i}}\) appliquée en A. Par conséquent, le moment de \(N\) forces concourantes de résultante nulle est nécessairement nul quel que soit le point où on le calcule.
Lorsqu'un système est soumis à un couple de forces opposées \(\{\overrightarrow{f_{1}},-\overrightarrow{f_{1}}\}\), appliquées en deux points distincts A et B, le moment résultant, appelé couple et noté \(\overrightarrow{\Gamma}\) est indépendant du point où on le calcule : \[\overrightarrow{\Gamma}= \overrightarrow{\text{OA}}\wedge\overrightarrow{f_{1}}+\overrightarrow{\text{OB}}\wedge(-\overrightarrow{f_{1}})= +\overrightarrow{\textrm{BA}}\wedge\overrightarrow{f_1}\] Ce couple n'est nul que si le couple de forces est concourant, conformément à ce que l'on a vu précédemment. De façon générale, on parle de couple pour décrire tout ensemble d'actions mécaniques dont la résultante des forces est nulle mais dont le moment résultant est non nul. Nous réservons la notation \(\overrightarrow{\Gamma}\) à ce type d'actions.
On obtient le moment en un point A à partir de celui calculé en un autre point B par la relation
valable aussi bien pour une force que pour une résultante des forces.
Notion de bras de levier
Il arrive souvent que toutes les forces soient dans un même plan. Dans ce cas, si l'on considère un point A de ce plan, tous les moments de force en A sont perpendiculaires à ce plan ; il est alors naturel d'utiliser des projections.
Soit \(\overrightarrow{u}\) le vecteur unitaire orientant un axe (\(\Delta\)) passant par un point A. Par définition, le moment d'une force par rapport à l'axe (\(\Delta\)) est le scalaire
Moment d'une force par rapport à un axe
\[ \mathcal{M}_{\Delta}(\overrightarrow{f})\stackrel{\text{def}}= \overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}(\overrightarrow{f})\cdot\overrightarrow{u} \]Ce nombre est indépendant de la position de A sur l'axe. En effet, pour un autre point A' sur l'axe, on a \[\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}(\overrightarrow{f})\cdot\overrightarrow{u}= \overrightarrow{\mathcal{{M}}_{\textrm{A'}}}(\overrightarrow{f})\cdot\overrightarrow{u}+ (\overrightarrow{\text{AA'}}\wedge\overrightarrow{f})\cdot\overrightarrow{u}= \overrightarrow{\mathcal{{M}}_{\textrm{A'}}}(\overrightarrow{f})\cdot\overrightarrow{u}\] puisque \(\overrightarrow{\text{AA'}}\) est colinéaire à \(\overrightarrow{u}\).
Considérons maintenant une force \(\overrightarrow{f}\) dans un plan \(\mathcal{P}\) et un axe orienté \((\Delta)\) perpendiculaire à \(\mathcal{P}\). Par définition, le bras de levier est la distance \(d\) entre la droite d'action de la force et l'axe \((\Delta)\).
Montrons que le moment par rapport à l'axe \((\Delta)\) ne dépend que de la force et de son bras de levier : \[\mathcal{M}_{\Delta}(\overrightarrow{f})= (\overrightarrow{\textrm{AM}}\wedge\overrightarrow{f})\cdot\overrightarrow{u}= \textrm{AM}\,f\,\sin(\widehat{\overrightarrow{\textrm{AM}},\overrightarrow{f}})=\pm f\,d\] On prendra le signe + lorsque la force tend à faire tourner le point M autour de l'axe dans le sens positif (associé au sens de \(\overrightarrow{u}\) par la règle du tire-bouchon) et - dans le cas contraire.
Moment d'une force par rapport à un axe \(\Delta\)
Le moment d'une force \(\overrightarrow{f}\) par rapport à un axe orienté \((\Delta)\) perpendiculaire au plan contenant la force vaut \[ \mathcal{M}_{\Delta}(\overrightarrow{f})=\pm f\,d \] où \(d\) est le bras de levier. Ce moment est positif quand la force tend à faire tourner le point M dans le sens positif ; il est négatif dans le cas contraire.
Moment cinétique
Définitions
Considérons un point matériel M de masse \(m\), animé d'une vitesse \(\overrightarrow{v}_{\!\text{M}/\mathcal{R}}\) par rapport à un référentiel \(\mathcal{R}\). Par définition, le de M en un point A est le vecteur
Moment cinétique en un point
\[ \overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\text{M})\stackrel{\text{def}}=\overrightarrow{\text{AM}}\wedge m\overrightarrow{v}_{\!\text{M}/\mathcal{R}}=\overrightarrow{\text{AM}}\wedge\overrightarrow{p} \]Ce vecteur, comme tous les moments, vérifie la relation analogue à (1) : \[\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}=\overrightarrow{L_{\textrm{B}}}+\overrightarrow{\textrm{AB}}\wedge\overrightarrow{p}\] valable aussi bien pour un point que pour un système de points.
On définit également le moment cinétique par rapport à un axe. Si \(\overrightarrow{u}\) désigne le vecteur unitaire orientant un axe (\(\Delta\)), le moment cinétique d'un point matériel par rapport à cet axe est la projection \(\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}\) sur l'axe : \[L_{\Delta}(\text{M})=\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\text{M})\cdot\overrightarrow{u} \qquad\text{avec}\qquad \textrm{A}\in (\Delta)\]
Moment cinétique d'un système de points
Dans un référentiel \(\mathcal{R}\), le moment cinétique d'un système \(\mathcal{S}\) de points matériels M\(_{i}\) est la somme vectorielle des moments cinétiques individuels : \[\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S})=\sum_{i}\overrightarrow{\text{AM}_{i}}\wedge m_{i}\overrightarrow{v_{i}} \quad\text{avec}\quad \overrightarrow{v_{i}}=\overrightarrow{v}_{\!\text{M}_{i}/\mathcal{R}}\]
Énonçons quelques propriétés :
- Le moment cinétique en A d'un système est relié à celui en B par une relation torsorielle :
\begin{equation} \overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S/R})= \overrightarrow{L_{\textrm{B}}}(\mathcal{S/R})+ \overrightarrow{\text{AB}}\wedge\overrightarrow{P}_{\mathcal{S/R}} \end{equation}
- Dans le référentiel barycentrique \(\mathcal{R}^{*}\), \(\overrightarrow{P^{*}}=\overrightarrow{0}\) (cf. Postulats de la dynamique). Par conséquent, \(\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S/R^{*}}) = \overrightarrow{L_{\textrm{B}}}(\mathcal{S/R^{*}})\) d'après l'équation (2). En d'autres termes, le moment cinétique barycentrique est indépendant du point où on le calcule. Nous le noterons désormais \(\overrightarrow{L}{}^{*}\). Ce moment cinétique est aussi appelé moment cinétique propre.
Théorème de Kœnig relatif au moment cinétique
Le résultat que nous avons démontré au chapitre 4 sur l'énergie cinétique (Théorème de Kœnig relatif à l'énergie cinétique) s'applique également au moment cinétique. En effet, considérons un système \(\mathcal{S}\) de masse \(m\) et de centre d'inertie G. Son moment cinétique s'écrit \[\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S})= \sum_{i}\overrightarrow{\text{AG}}\wedge m_{i}\overrightarrow{v_{i}}+\sum_{i}\overrightarrow{\text{GM}_{i}}\wedge m_{i}\overrightarrow{v_{i}}\] La composition du mouvement indique que \[\overrightarrow{v}_{\!\text{M}_{i}/\mathcal{R}}=\overrightarrow{v_{i}}{}^{*}+\overrightarrow{v_{\text{G}}} \quad\text{avec}\quad \left\{\begin{array}{ccc} \overrightarrow{v_{i}}{}^{*} &=& \overrightarrow{v}_{\!\text{M}_{i}/\mathcal{R^{*}}} \\ \overrightarrow{v_{\text{G}}} &=& \overrightarrow{v}_{\text{G}/\mathcal{R}} \end{array}\right.\] Il vient alors \[\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S})= \overrightarrow{\text{AG}}\wedge \sum_{i}m_{i}\overrightarrow{v_{i}}+\sum_{i}m_{i}\overrightarrow{\text{GM}_{i}}\wedge \overrightarrow{v_{i}}{}^{*}+\left(\sum_{i}m_{i}\overrightarrow{\text{GM}_{i}}\right)\wedge\overrightarrow{v_{\text{G}}}\] Or, d'une part \(\sum m_{i}\overrightarrow{\text{GM}_{i}}=\overrightarrow{0}\) par définition de G, et d'autre part \(\sum m_{i}\overrightarrow{v_{i}}=m\overrightarrow{v_{\text{G}}}\). Par conséquent,
2nd théorème de Kœnig
\[ \overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S})=\overrightarrow{L}{}^{*}+\overrightarrow{\text{AG}}\wedge m\overrightarrow{v_{\text{G}}} \]Le moment cinétique d'un système de points, à l'instar de l'énergie cinétique, se décompose en deux termes : le terme barycentrique auquel s'ajoute le moment cinétique d'un point matériel de masse \(m\) situé en G. Cela constitue le second théorème de Kœonig.
Il vient en conséquence que le moment cinétique calculé en G s'identifie avec le moment barycentrique : \[\overrightarrow{L_{\textrm{G}}}(\mathcal{S})=\overrightarrow{L}{}^{*}\]
Importance du moment cinétique en physique
En mécanique classique le moment cinétique est une grandeur qui a la particularité de se conserver lorsqu'un système est soumis à un champ de forces centrales (cf. chapitre suivant). Cependant, c'est en mécanique quantique que le moment cinétique joue un rôle fondamental :
- Le premier modèle quantique de l'atome est du au physicien danois Niels Bohr (1913) qui eut l'idée de proposer un modèle d'atome où le moment cinétique de l'électron est quantifié : il ne peut prendre que des valeurs des valeurs multiples de \(\hbar=\frac{h}{2\pi}=1,054.10^{-34}\;\mathrm{J.s}\).
- L'expérience de Stern et Gerlach montra que l'électron possède un moment cinétique propre quantifié, dit moment de spin. A l'heure actuelle, dans le modèle standard de la physique des particules, toutes les particules sont caractérisées par une charge, une masse et un moment de spin.
- Les propriétés magnétiques de la matière ne peuvent s'expliquer que dans le cadre quantique où le moment de spin joue un rôle clé. La Résonance magnétique nucléaire (RMN), l'Imagerie par Résonance Magnétique nucléaire (IRM) , l'électronique de spin sont quelques exemples d'applications modernes où la notion de moment cinétique joue un rôle central.
Théorème du moment cinétique
Le théorème du moment cinétique découle directement du principe fondamental de la dynamique et ne possède donc pas plus d'information. Dans le cas des systèmes conservatifs à force centrale, il permet de dégager une seconde intégrale première qui s'interprète de façon géométrique.
Cas du point matériel
Considérons un point matériel M de masse \(m\) en mouvement dans un référentiel galiléen \(\mathcal{R}\) et soumis à une force \(\overrightarrow{f}\). Dérivons le moment cinétique de M calculé en un point quelconque A : \[\frac{\mathrm{d} \overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\text{M})}{\mathrm{d} t}= \frac{\mathrm{d} \overrightarrow{\text{AM}}}{\mathrm{d} t}\wedge m\overrightarrow{v}_{\!\text{M}/\mathcal{R}} +\overrightarrow{\text{AM}}\wedge m\frac{\mathrm{d}\overrightarrow{v}_{\!\text{M}/\mathcal{R}}}{\mathrm{d} t}\] Sachant que d'une part \(\frac{\mathrm{d}\overrightarrow{\textrm{AM}}}{\mathrm{d}t}=\overrightarrow{v}_{\!\text{M}/\mathcal{R}}-\overrightarrow{v}_{\!\text{A}/\mathcal{R}}\), et que d'autre part \(m\frac{\mathrm{d}\overrightarrow{v}_{\!\text{M}/\mathcal{R}}}{\mathrm{d} t}= \overrightarrow{f}\) (P.F.D), on obtient
Lorsque A est fixe dans \(\mathcal{R}\), le deuxième terme se résume au moment de la force \(\overrightarrow{f}\), ce qui constitue le théorème du moment cinétique.
Théorème du moment cinétique (TMC)
Dans un référentiel galiléen, un point matériel M soumis à une résultante de forces \(\overrightarrow{f}\), voit son moment cinétique calculé en un point fixe A, évoluer suivant la relation cause/effet : \[ \frac{\mathrm{d} \overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\text{M})}{\mathrm{d}t} =\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}(\overrightarrow{f}) \quad\text{avec A fixe dans }\mathcal{R} \] En projetant cette relation suivant un axe fixe orienté (\(\Delta\)), on obtient \[ \frac{\mathrm{d}L_{\Delta}(\text{M})}{\mathrm{d}t}=\mathcal{{M}}_{\Delta}(\overrightarrow{f}) \]
Cas des systèmes de points
En appliquant, à chaque point matériel M\(_{i}\) d'un système \(\mathcal{S}\), le théorème du moment cinétique en un point fixe A, il vient après sommation \[\frac{\mathrm{d}\overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S})}{\mathrm{d}t}= \sum_{i}\overrightarrow{\text{AM}_{i}}\wedge\overrightarrow{f_{i}}{}^{\!\textrm{ext}}+\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}{}^{\textrm{int}}\] où \(\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}{}^{\textrm{int}}\) désigne la somme des moments des forces intérieures calculée au point fixe A. Le principe des actions réciproques stipule cependant que les forces d'interactions sont opposées et coaxiales : \[\left\{\begin{array}{rcr} \overrightarrow{f_{ij}} &=& -\overrightarrow{f_{ji}}\\[3mm] \overrightarrow{\text{M}_{i}\text{M}_{j}}\wedge\overrightarrow{f_{ij}} &=& \overrightarrow{0} \end{array}\right.\] En d'autres termes, les forces internes constituent des couples de force de moment nul. Ainsi la somme des moments de forces internes s'annule. Finalement, le théorème du moment cinétique pour un système de points prend la forme suivante :
Théorème du Moment Cinétique II
Dans un référentiel galiléen, nous avons montré que la variation de quantité de mouvement d'un système ne dépendait que de la résultante des forces extérieures ; de la même façon, la variation du moment cinétique total ne dépend que de la somme des moments associés aux forces extérieures. \[ \frac{\mathrm{d} \overrightarrow{L_{\textrm{A}}}(\mathcal{S})}{\mathrm{d}t}= \sum_{i}\overrightarrow{\text{AM}_{i}}\wedge\overrightarrow{f_{i}}{}^{\!\textrm{ext}}= \overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}{}^{\textrm{ext}} \quad\text{avec A point fixe} \]
Si l'on choisit le centre d'inertie G comme point A, la condition A point fixe
n'est pas nécessaire. En effet, à partir de l'équation (3), on obtient
\[\frac{\mathrm{d} \overrightarrow{L_{\textrm{G}}}(\mathcal{S})}{\mathrm{d}t}=
\sum_{i}\overrightarrow{\text{GM}_{i}}\wedge\overrightarrow{f_{i}}{}^{\!\textrm{ext}}+
\left(\sum_{i}m_{i}\overrightarrow{v_{i}}\right)\wedge \overrightarrow{v}_{\!\text{G}/\mathcal{R}}\]
Sachant que \(\sum_{i}m\overrightarrow{v_i}=m\overrightarrow{v}_{\!\text{G}/\mathcal{R}}\) il vient
\[
\fcolorbox{#FF9D00}{#FEF5EB}{\quad
\(\displaystyle
\frac{\mathrm{d} \overrightarrow{L_{\textrm{G}}}(\mathcal{S})}{\mathrm{d} t}=
\frac{\mathrm{d} \overrightarrow{L}{}^{*}}{\mathrm{d} t}=
\overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{G}}}{}^{\textrm{ext}}
\)\quad}
\;\color{#FF9900}{\heartsuit}
\]
Finalement, l'association du théorème du centre d'inertie et du théorème du moment cinétique permet de découpler le mouvement de \(\mathcal{S}\) en deux mouvements :
- le mouvement du centre d'inertie régi par l'équation \[m\frac{\mathrm{d} \overrightarrow{v_{G}}}{\mathrm{d} t}=\overrightarrow{F}{}^{\textrm{ext}}\]
- le mouvement barycentrique régi par la relation \[\frac{\mathrm{d} \overrightarrow{L}{}^*}{\mathrm{d}t}= \overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{G}}}{}^{\textrm{ext}}\]
Ces deux équations vectorielles donnent six relations, insuffisantes en général pour décrire complètement le mouvement de \(\mathcal{S}\). Cependant l'étude des solides parfaits —systèmes à six degrés de liberté— peut être réalisé complètement à l'aide de ces deux équations, auxquelles il faut éventuellement ajouter des relations de liaison liées aux contacts.
Applications
Mouvement à forces centrales
Une force est dite centrale de centre O quand, à chaque instant, la droite support de cette force passe par un point fixe O. Si l'on considère un système de coordonnées sphériques d'origine O, un champ de force centrale s'écrit \[\overrightarrow{f}(\text{M})=f(r,\theta,\varphi)\overrightarrow{u_{r}}\] Par exemple, dans le référentiel géocentrique, la force de gravitation produite par la Terre sur un satellite artificiel est une force centrale à condition de supposer la Terre à symétrie sphérique.
Que dit le théorème du moment cinétique quant au mouvement d'un point matériel M soumis à une force centrale dans un référentiel galiléen ? \[\frac{\text{d}\overrightarrow{L_{\textrm{O}}}(\text{M})}{\text{d}t}= r\overrightarrow{u_{r}}\wedge f(r,\theta,\varphi)\overrightarrow{u{}_{r}}=\overrightarrow{0} \qquad\Longrightarrow\qquad \overrightarrow{L_{\textrm{O}}}(\text{M})=\overrightarrow{\mathrm{C^{te}}}\] Ainsi, le moment cinétique se conserve en norme et en direction d'où l'on tire les trois conséquences suivantes.
- Le mouvement est plan ! En effet, à chaque instant, le vecteur \(\overrightarrow{\text{OM}}\) est perpendiculaire au vecteur constant \(\overrightarrow{L}_{\textrm{O}}(\text{M})\).
- Le mouvement étant plan, on utilise les coordonnées polaires pour repérer la position de M. Le moment cinétique s'écrit \(r \overrightarrow{u_r} \wedge m(\dot{r} \overrightarrow{u_r}+r\dot{\theta} \overrightarrow{u_\theta})=mr^{2}\dot{\theta} \overrightarrow{u_z}\) et sa conservation se traduit par
Loi des aires
\[ r^{2}\dot{\theta}=C \] - L'aire balayée par le vecteur \(\overrightarrow{\rm OM}\) par unité de temps est constante et égale à \(\frac{C}{2}\) (vitesse aréolaire). En effet, l'aire balayée par le vecteur \(\overrightarrow{\rm OM}\) entre \(t\) et \(t+\text{d}t\) vaut (Rappelons que l'aire d'un triangle (ABC) vaut \(\frac12\Vert\overrightarrow{\text{AB}}\wedge\overrightarrow{\text{AC}}\Vert\)) \[\begin{array}{rcl} \mathrm{d} \mathcal{A} &=& \frac{1}{2}\left\Vert \overrightarrow{\text{OM}}(t+\mathrm{d} t)\wedge\overrightarrow{\text{OM}}(t)\right\Vert \\[4mm] &=& \frac{1}{2}\left\Vert \left(\overrightarrow{\text{OM}}(t)+ \overrightarrow{v_{\textrm{M}}} \mathrm{d} t \right)\wedge\overrightarrow{\text{OM}}(t)\right\Vert \\[4mm] &=& \frac{1}{2}\left\vert C \right\vert \, \mathrm{d} t \end{array}\] Ainsi l'aire balayée par le vecteur \(\overrightarrow{\text{OM}}\) augmente à une vitesse, dite vitesse aréolaire, \[\frac{ \mathrm{d} \mathcal{A}}{\mathrm{d} t}=\frac{C}{2}\] On retrouve ici la loi des aires énoncée par Kepler au sujet des astres du système solaire. On voit ici que cette propriété n'est pas limitée aux forces de gravitation mais propre à toutes les forces centrales.
Solide en équilibre
Considérons un solide \(\mathcal{S}\) en équilibre dans un référentiel \(\mathcal{R}\) galiléen. Étant au repos, le système ne possède ni quantité de mouvement, ni moment cinétique. Par conséquent, \[\left\{\begin{array}{rcl} \overrightarrow{F}{}^{\textrm{ext}} &=& \overrightarrow{0} \\ \overrightarrow{\mathcal{M}_{\textrm{A}}}{}^{\textrm{ext}} &=&\overrightarrow{0}\quad\forall \text{A} \\ \end{array}\right.\]
Dans le cas où seules deux forces s'appliquent en deux points A et B d'un solide, la condition d'équilibre traduit le fait que ces deux forces forment un couple de moment nulle ce qui signifie que ces deux forces sont opposées et coaxiales.
Dans le cas d'un solide soumis à trois forces non parallèles (\(\overrightarrow{f_{1}}\), \(\overrightarrow{f_{2}}\), \(\overrightarrow{f_{3}}\)), deux d'entre elles (par exemple \(\overrightarrow{f_{1}}\) et \(\overrightarrow{f_{2}}\)) ont nécessairement leur prolongement qui se coupent en un point A. Le système d'action est alors équivalent à deux forces \(\overrightarrow{f_{12}}\) et \(\overrightarrow{f_{3}}\) avec \(\overrightarrow{f_{12}}=\overrightarrow{f_{1}}+\overrightarrow{f_{2}}\) s'appliquant en A. On se ramène au cas précédent où l'on a vu que l'équilibre impliquait que les deux forces sont coaxiales. Le prolongement de \(\overrightarrow{f_{3}}\) passe donc aussi par A. En d'autres termes les trois forces sont concourantes en A.
Solide soumis à trois forces
Lorsqu'un solide soumis à trois forces non parallèles est au repos, ces trois forces sont de résultante nulle et concourantes en un même point.
Exercice
Une échelle de masse \(m\) et de longueur \(L\) est en équilibre contre un mur et forme un angle \(\alpha\) avec la verticale. On suppose que le sol produit une force de frottement alors que le mur, supposé suffisamment lisse, n'en produit pas. Exprimer les forces de contact en fonction du poids \(P=mg\) de l'échelle et de l'angle \(\alpha\).
Rép. — L'échelle est soumise à 4 forces extérieures : \(F_1\), \(F_2\), \(F_3\) et le poids \(P=mg\). L'équilibre implique que la résultante des forces est nulle, soit \[ F_1=mg \qquad\text{et}\qquad F_2=F_3 \] Par ailleurs, on est en présence d'un système de trois forces s'équilibrant : \(\overrightarrow{F_{12}}=\overrightarrow{F_1}+\overrightarrow{F_2}\) appliqué en A, \(\overrightarrow{F_3}\) en B et \(\overrightarrow{P}\) en G (centre d'inertie). Ces trois actions sont donc concourantes en un point que l'on note C. La ligne CA forme par rapport à la verticale un angle \(\theta\) donné par \[ \tan\theta=\dfrac{\frac12 L\sin\alpha}{L\cos\alpha}=\frac12 \tan \alpha \] Or, la projection de \(F_{12}\) donne \[ F_1=F_{12}\cos\theta \qquad\text{et}\qquad F_2=F_{12}\sin\theta\] de sorte que \(F_2=F_1 \tan \theta\). Finalement on trouve : \[ F_1=mg \qquad\text{et}\qquad F_2=F_3=\frac12 mg\tan\alpha \]
Solide en rotation autour d'un axe fixe
Supposons un solide \(\mathcal{S}\) en rotation autour d'un axe fixe orienté \((\Delta)\) à la vitesse angulaire \(\omega\) (\(\omega>0\) si le solide tourne dans le sens positif). Chaque point M\(_{i}\) de masse \(m_{i}\) constituant le solide décrit un cercle de rayon H\(_{i}\)M\(_{i}=r_i\) où \(\text{H}_i\) est la projection de Mi sur l'axe \((\Delta)\). Leur moment cinétique par rapport à l'axe vaut donc \[L_{\Delta}(\text{M}_{i})=m_{i}\,v_{i}\,r_i=m_{i}\, r_i^2\,\omega \quad\text{car}\quad v_i=r_i\omega\] Par conséquent, le solide \(\mathcal{S}\) possède un moment cinétique \[L_{\Delta}(\mathcal{S})=I_{\Delta}\,\omega \quad \text{avec} \quad I_{\Delta}= \sum_{i}m_{i}\, r_i^2 \] où \(I_{\Delta}\) désigne le moment d'inertie du solide par rapport à l'axe. Le moment cinétique est donc proportionnel à la vitesse angulaire et au moment d'inertie qui dépend non seulement de la masse totale mais aussi de sa répartition autour de l'axe de rotation. Ainsi, en vertu du théorème du moment cinétique, le mouvement de rotation d'un solide autour d'un axe fixe est régi par l'équation
Équation d'évolution de la vitesse angulaire
\[ I_\Delta\frac{\mathrm{d}\omega}{\mathrm{d}t}=\mathcal{M}_\Delta^{\textrm{ext}} \qquad\text{avec}\qquad I_{\Delta}= \sum_{i}m_{i}\, r_i^2 \]Exemple : Le pendule pesant
Considérons un pendule pesant de masse \(m\) en rotation autour d'un axe horizontal grâce à une liaison parfaite en O. Le centre de gravité est à la distance \(\ell\) de O. Orientons l'axe de rotation de telle sorte que le sens positif des angles soit le sens trigonométrique. Le moment cinétique par rapport à l'axe vaut donc \(L_{\Delta}=I_{\Delta}\,\dot{\theta}\).
Le bilan des actions extérieures donne \[\left\{\begin{array}{lccl} \text{Poids appliqué en G :} &\overrightarrow{P}=m\overrightarrow{g} &\text{et} &\mathcal{M}_{\Delta}(\overrightarrow{P})=-P\times d=-mg \ell \sin\theta\\ \text{Contact en O :} &\overrightarrow{R} &\text{et} & \mathcal{M}_{\Delta}(\overrightarrow{R})=0 \end{array}\right.\] Le théorème du moment cinétique donne donc \[\frac{\mathrm{d}}{\mathrm{d} t}(I_{\Delta}\dot{\theta})=-mg\ell \sin \theta \quad\Longrightarrow\quad\ddot{\theta}+\frac{mg\ell}{I_{\Delta}}\sin\theta=0\] On reconnaît ici l'équation différentielle d'un pendule simple de pulsation propre \[\omega_{0}=\sqrt{\frac{mg\ell}{I_{\Delta}}}\] On retrouve bien sûr le cas particulier du pendule simple où toute la masse est concentrée en G : \[I_{\Delta}=m\ell^{2}\quad\Longrightarrow\quad\omega_{0}=\sqrt{\frac{g}{\ell}} \quad\text{[pendule simple]}\] Pour une barre rectiligne homogène de masse \(m\), de longueur \(L\), fixée en l'une de ses extrémités on obtient \[I_{\Delta}=\frac{1}{3}m L^{2}\quad\text{et}\quad \ell =\frac{L}{2} \quad\Longrightarrow\quad \omega_{0}=\sqrt{\frac{3g}{4\ell}} \quad\text{[barre rectiligne]}\]