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MENUCours Outils et Méthodes pour la Physique

Ce cours, sans prétention sur le plan de la rigueur mathématique, se concentre avant tout sur la manipulation des fonctions de plusieurs variables. Pour une première approche des notions de dérivée partielle et différentielle, on se restreint aux fonctions de deux variables.

Dérivée partielle

Définition

Considérons \(f=f(x,y)\), une fonction de deux variables indépendantes \(x\) et \(y\). On appelle dérivée partielle, la dérivée de \(f\) par rapport à une variable, les autres étant maintenues constante. Ici, il y a deux dérivées partielles du premier ordre que l'on note \[ \left.\frac{\partial f}{\partial x}\right|_{y} \quad\text{et}\quad \left.\frac{\partial f}{\partial y}\right|_{x} \] où l'on précise quelle variable est maintenue constante en la signalant en indice.

Exemple

Calculons les deux dérivées partielles de la fonction \(f(x,y)=x^{2}\sin(y)\) : \[ \left.\frac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}=2x\sin(y) \quad\text{et}\quad \left.\frac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}=x^2\cos(y) \]

Ici, les deux dérivées existent et sont continues : on dit que la fonction est de classe \(C^1\).

Pour alléger la notation, on omet souvent de faire figurer les variables maintenues constantes en indice quand le contexte est assez clair.

Toutefois, cette notation a son intérêt en physique, notamment en Thermodynamique : imaginons une grandeur physique \(G\) fonction de deux variables \((x,y)\) que l'on souhaite exprimer en fonction d'un nouveau jeux de variables \((u,v)\). Alors que le mathématicien préfère appeler cette nouvelle fonction différemment, le physicien, quant à lui préfère conserver le même nom (\(G(x,y)\) ou \(G(u,v)\)) car associé à une même grandeur physique. Dans ce cas, il est impératif lors d'un calcul de dérivée partielle de savoir quelles sont les variables utilisées.

Exemple

Le volume d'un cylindre de rayon \(r\) et de hauteur \(h\) s'écrit \(V(h,r)=\pi r^2 h\), et l'aire de sa surface latérale \(S(h,r)=2\pi r\,h\). Y-a-t-il une différence entre \(\left.\frac{\partial V}{\partial h}\right|_{r}\) et \(\left.\frac{\partial V}{\partial h}\right|_{S}\) ?

La première dérivée suppose d'utiliser la fonction \(V(h,r)\) : \[ \left.\frac{\partial V}{\partial h}\right|_{r}= \left.\frac{\partial(\pi r^2h)}{\partial h}\right|_{r}= \pi r^2 \] Quant à \(\left.\frac{\partial V}{\partial h}\right|_{S}\), il faut d'abord exprimer \(V\) en fonction de \(h\) et \(S\). Sachant que \(r=S/(2\pi h)\), on trouve \[ V(h,S)=\frac{S^2}{4\pi h} \quad\text{d'où}\quad \left.\frac{\partial V}{\partial h}\right|_{S}=-\frac{S^2}{4\pi h^2}=-\pi r^2 \] On obtient donc un résultat différent (opposé ici). En effet, augmenter \(h\) en fixant le rayon du cylindre revient à augmenter le volume (\(\left.\partial V/\partial h\right|_{r}>0\)), alors qu'augmenter \(h\) en maintenant \(S\) impose de diminuer \(r\), cette dernière variation entraînant une diminution du volume plus importante que celle induite par l'augmentation de \(h\) (d'où \(\left.\partial V/\partial h\right|_{S}<0\))

Interprétation géométrique

Interprétation géométrique de la notion de dérivée partielle. Les vecteurs sont des vecteurs tangents aux deux courbes se coupant en M.
Interprétation géométrique de la notion de dérivée partielle. Les vecteurs sont des vecteurs tangents aux deux courbes se coupant en M.

Si l'on trace dans un espace à trois dimensions l'ensemble des points d'équation cartésienne \(z=f(x,y)\), on obtient une surface comme sur la figure ci-contre.

L'intersection de celle-ci avec un plan d'équation \(x=x_0\) décrit une courbe \(\mathcal{C_{x_0}}\), alors que l'intersection avec le plan d'équation \(y=y_0\) donne une autre courbe \(\mathcal{C_{y_0}}\). Évidemment ces deux courbes se coupent en \(M(x_0,y_0,f(x_0,y_0))\).

La dérivée partielle \(\left.\dfrac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}(x_0,y_0)\) représente la pente de la tangente à la courbe \(\mathcal{C}_{y_0}\), au point M comme indiquée sur la Fig.1.

De la même façon, \(\left.\dfrac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}(x_0,y_0)\) représente la pente de la tangente en M\(\in \mathcal{C}_{x_0}\).

Théorème de Schwarz

Les dérivées partielles d'ordre un étant fonctions de \((x,y)\), on peut à nouveau les dériver. On introduit alors quatre nouvelles dérivées \[ \begin{array}{lcr} \left.\dfrac{\partial }{\partial x} \left(\left.\dfrac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}\right)\right|_{y}= \left.\dfrac{\partial^2 f}{\partial x^2}\right|_y &\quad& \left.\dfrac{\partial }{\partial y} \left(\left.\dfrac{\partial f}{\partial y}\right|_{x} \right)\right|_{x}=\left.\dfrac{\partial^2 f}{\partial y^2}\right|_x\\[8mm] \left.\dfrac{\partial }{\partial x} \left(\left.\dfrac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}\right)\right|_{y}=\dfrac{\partial^2 f}{\partial x\partial y} &\quad& \left.\dfrac{\partial }{\partial y} \left(\left.\dfrac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}\right)\right|_{x}= \dfrac{\partial^2 f}{\partial y\partial x}\\ \end{array} \]

Exemple

Reprenons l'expression du volume \(V(h,r)\) d'un cylindre et calculons les quatre dérivées d'ordre deux : \[ \begin{array}{lcl} \left.\dfrac{\partial^2 V}{\partial h^2}\right|_r= \left.\dfrac{\partial (\pi r^2)}{\partial h}\right|_{r}=0 &\quad& \left.\dfrac{\partial^2 V}{\partial r^2}\right|_{h}= \left.\dfrac{\partial (2\pi r h)}{\partial r}\right|_h=2\pi h\\[4mm] \dfrac{\partial^2 V }{\partial h\partial r}= \left.\dfrac{\partial (2\pi rh)}{\partial h}\right|_{r} =2\pi r &\quad& \dfrac{\partial^2 V}{\partial r\partial h} = \left.\dfrac{\partial (\pi r^2)}{\partial r}\right|_{h}= 2\pi r \end{array} \]

Ici, les dérivées d'ordre deux existent et sont continues : on dit que \(V(h,r)\) est de classe \(C^2\).

Comme on le voit sur l'exemple précédent, l'ordre dans lequel on calcule les dérivées croisées ne semble pas avoir d'importance. C'est en fait une propriété très générale dès lors que la fonction est suffisamment régulière.

Théorème de Schwarz

Pour une fonction de classe \(C^{2}\), on a : \[ \frac{\partial^{2}f}{\partial y\partial x}= \frac{\partial^{2}f}{\partial x\partial y} \]

Et plus généralement, le résultat du calcul d’une dérivée partielle d’ordre quelconque d’une fonction suffisamment régulière, ne dépend pas de l’ordre des dérivations.

Différentielle

Définition mathématique

Considérons une fonction \(f=f(x,y)\) dérivable en \((x,y)\). On appelle différentielle de \(f\), l'application linéaire qui associe aux réels \(h\) et \(k\), le nombre réel \(\mathrm{d}f\) tel que \[ \mathrm{d}f=\left.\frac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}\,h+ \left.\frac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}\,k \]

Propriétés de la différentielle
FonctionDifférentielle
\(f+g\)\(\mathrm{d}f+\mathrm{d}g\)
\(fg\)\(g\mathrm{d}f+f\mathrm{d}g\)
\(\ln(|f|)\)\(\mathrm{d}f/f\)
\(f(x,y)=\mathrm{C^{te}}\)\(\mathrm{d}f=0\)

Si l'on note \(\mathrm{d}x\) la différentielle de la fonction \(f(x,y)=x\), on obtient \(\mathrm{d}x=h\). De même la différentielle de la fonction \(g(x,y)=y\), notée \(\mathrm{d}y\) vaut \(k\). C'est pourquoi, on écrit la différentielle sous la forme suivante

\begin{equation} \fcolorbox{#FF9D00}{#FEF5EB}{\quad \(\displaystyle \mathrm{d}f=\left.\frac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}\,\mathrm{d}x+ \left.\frac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}\,\mathrm{d}y \)\quad} \;\color{#FF9900}{\heartsuit} \end{equation}

Notez que le mathématicien ne suppose nullement que les quantités \(\mathrm{d}x\), \(\mathrm{d}y\) et \(\mathrm{d}f\) soient infiniment petites.

Une propriété importante à retenir est le caractère invariant de la différentielle vis à vis du changement de variable. Autrement dit, dans l'expression(1), \(x\) peut désigner indifféremment la variable originelle ou bien une fonction d'une autre variable.

Exemple

Reprenons le volume du cylindre et supposons que son aire soit maintenue constante : \[ V(h,r)=\pi r^2h \quad\text{et}\quad S(h,r)=2\pi r h=S_0 \] La contrainte sur \(S\) revient à dire que \(h\) est implicitement fonction de \(r\) et qu'il n'y a qu'une variable indépendante. Ici on peut même exprimer une telle relation puisque \(h=S_0/(2\pi r)\). Si l'on injecte cette relation dans \(V\), on obtient \[ V(r)=\frac{r}{2}S_0 \quad\text{soit}\quad \mathrm{d}V=V'(r)\, \mathrm{d}r=\frac{S_0}{2}\, \mathrm{d}r \] On aurait pu aussi exprimer les différentielles des fonctions \(V(h,r)\) et \(S(r,h)\) : \[ \mathrm{d}V(r,h)=2\pi r h\, \mathrm{d}r+\pi r^2\, \mathrm{d}h \quad\text{et}\quad \mathrm{d}S(r,h)=0=2\pi(h\, \mathrm{d}r+r\, \mathrm{d}h) \] pour en déduire \(\mathrm{d}h=-h/r\, \mathrm{d}r\). En réinjectant dans l'expression de \(\mathrm{d}V\), on aboutit à \[ \mathrm{d}V=\pi r h\, \mathrm{d}r=\frac{S_0}{2}\, \mathrm{d}r \]

Point de vue du physicien

Contrairement au mathématicien, le physicien réserve la notation \(\mathrm{d}x\) et \(\mathrm{d}y\) à des accroissements infiniment petits des variables \(x\) et \(y\). La différentielle \(\mathrm{d}f\) s'interprète alors comme une variation infinitésimale de la grandeur \(f\) suite aux variations \(\mathrm{d}x\) et \(\mathrm{d}y\).

Ce point de vue provient du théorème de Taylor-Young : \[ f(x+h,y+k)=f(x,y)+\left.\frac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}\,h+ \left.\frac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}\,k+\|(h,k)\|\epsilon(h,k) \] avec \(\lim_{\|(h,k)\|\to0}\epsilon(h,k)=0\). Ainsi la différentielle peut être vue comme une approximation linéaire (à l'ordre un) d'une variation \[ \Delta f=f(x+\Delta x,y+\Delta y)-f(x,y)\simeq \left.\frac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}\,\Delta x+ \left.\frac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}\,\Delta y \] Expression qui produit une erreur d'autant plus faible que \(\Delta x\) et \(\Delta y\) sont petits. À ce titre, le calcul différentiel est souvent utilisé en physique pour approcher la variation d'une grandeur.

Exemple

Un cylindre voit son rayon \(r\) augmenter de 1% et sa hauteur \(h\) diminuer de 1%. Déterminons la variation relative de son volume. Pour cela, commençons par différentier le volume \(V(r,h)=\pi r^2\,h\): \[ \mathrm{d}V=2\pi r h\, \mathrm{d}r+\pi r^2\, \mathrm{d}h \] On en déduit une valeur approchée de la variation de volume : \[ \Delta V\simeq 2\pi r h\, \Delta r+\pi r^2\, \Delta h \] ce qui donne en valeur relative \(\Delta V/V\simeq 2\Delta r/r+\Delta h/h= 1\%\). Le volume augmente donc de 1%.

Fonctions implicites

Il arrive fréquemment, notamment en Thermodynamique, que certaines variables, appelons-les \(x\), \(y\) et \(z\), ne soient pas indépendantes, mais liées par une relation de la forme \(g(x,y,z)=0\). Dans ce cas, chaque variable est définie implicitement en fonction des deux autres, et on peut écrire \[ x=x(y,z)\quad y=y(x,z) \quad\text{et}\quad z=z(x,y) \] Même si l'on ne sait pas expliciter ces fonctions, il est possible de mettre en relation leurs dérivées partielles. En effet, considérons la fonction \(x=x(y,z)\) et écrivons sa différentielle : \[ \mathrm{d}x=\left.\frac{\partial x}{\partial y}\right|_{z}\, \mathrm{d}y+ \left.\frac{\partial x}{\partial z}\right|_{y}\, \mathrm{d}z \] On en déduit par exemple \(\mathrm{d}y\) : \[ \mathrm{d}y=\frac{1}{(\partial x/\partial y)_z}\, \mathrm{d}x- \frac{(\partial x/\partial z)_y}{(\partial x/\partial y)_z}\, \mathrm{d}z \] Identifions cette relation avec l'expression de la différentielle de \(y(x,z)\) : \[ \mathrm{d}y=\left.\frac{\partial y}{\partial x}\right|_{z}\, \mathrm{d}x+ \left.\frac{\partial y}{\partial z}\right|_{x}\, \mathrm{d}z \] On en déduit

\begin{equation} \fcolorbox{#FF9D00}{#FEF5EB}{\quad \(\displaystyle \left.\frac{\partial y}{\partial x}\right|_{z}= \dfrac{1}{\left.\dfrac{\partial x}{\partial y}\right|_{z}} \)\quad} \;\color{#FF9900}{\heartsuit} \end{equation}

et \(\left.\dfrac{\partial y}{\partial z}\right|_{x}=-\dfrac{(\partial x/\partial z)_y}{(\partial x/\partial y)_z}\) soit

\begin{equation} \fcolorbox{#FF9D00}{#FEF5EB}{\quad \(\displaystyle \left.\frac{\partial x}{\partial y}\right|_{z}\times \left.\frac{\partial y}{\partial z}\right|_{x}\times \left.\frac{\partial z}{\partial x}\right|_{y}=-1 \)\quad} \;\color{#FF9900}{\heartsuit} \end{equation}

appelée relation triangulaire. Notez au passage que le fait que ce produit vaut -1 et non +1 montre que l'on ne peut pas traiter une dérivée partielle comme une fraction.

Exemple

L'équation d'état d'un gaz de van der Waals est donnée par \[ \left(p+\frac{a}{V^2}\right)(V-b)=RT \] où \(a\), \(b\) et \(R\) sont trois constantes positives. On désire calculer le coefficient de dilation thermique isobare de ce gaz défini par \[ \alpha \stackrel{\text{def}}=\frac{1}{V}\left.\frac{\partial V}{\partial T}\right|_{p} \] Le premier réflexe consiste à chercher l'expression \(V(T,p)\). Cependant, un examen rapide de l'équation nous annonce des calculs pénibles puisque \(V\) s'obtient en résolvant une équation du troisième degré. Il est alors beaucoup plus astucieux d'utiliser la relation(3) : \[ \left.\frac{\partial V}{\partial T}\right|_{p}\times \left.\frac{\partial T}{\partial p}\right|_{V}\times \left.\frac{\partial p}{\partial V}\right|_{T}=-1 \] En effet, les dérivées \(\partial T/\partial p|_{V}\) et \(\partial p/\partial V|_{T}\) se calculent aisément : \[ \begin{array}{ccccl} T&=&\dfrac{p(V-b)}{R}+\dfrac{a(V-b)}{RV^2}&\text{d'où}& \left.\dfrac{\partial T}{\partial p}\right|_{V}=\dfrac{V-b}{R}\\[4mm] p&=&\dfrac{RT}{V-b}-\dfrac{a}{V^2}&\text{et donc}& \left.\dfrac{\partial p}{\partial V}\right|_{T}=-\dfrac{RT}{(V-b)^2}+\dfrac{2a}{V^3}\\ \end{array} \] Ainsi, la relation triangulaire permet d'obtenir \[ \left.\frac{\partial V}{\partial T}\right|_{p}= \frac{(V-b)V^3}{TV^3-\frac{2a}{R}(V-b)^2} \] ce qui donne \[ \alpha_\text{vdW}=\frac{(V-b)V^2}{TV^3-\frac{2a}{R}(V-b)^2} \]

Forme différentielle

Considérons la forme différentielle suivante : \[ \omega =a(x,y)\, \mathrm{d}x+b(x,y)\, \mathrm{d}y \] S'il existe une fonction \(f(x,y)\) tel que \(\omega=\mathrm{d}f\), on dit qu'il s'agit une différentielle totale exacte. Quand c'est le cas, les fonctions \(a(x,y)\) et \(b(x,y)\) sont contraintes par le théorème de Schwarz

Théorème de Schwarz

Soit \(a(x,y)\, \mathrm{d}x+b(x,y)\, \mathrm{d}y\) une forme différentielle de . Si cette forme est une différentielle totale exacte, alors on doit avoir

\begin{equation} \left.\frac{\partial a}{\partial y}\right|_{x}= \left.\frac{\partial b}{\partial x}\right|_{y} \end{equation}

Cette propriété est largement utilisée en thermodynamique [1].

Exemple

Considérons le bilan d'énergie d'une mole de gaz parfait subissant une évolution réversible : \[ \mathrm{d}U(T)=\delta Q^\text{rev}-p\, \mathrm{d}V=C_v(T)\, \mathrm{d}T \] où \(p\), \(V\) et \(T\) désignent la pression, le volume et la température du gaz. \(C_v(T)\) est la capacité thermique du gaz et \(\delta Q^\text{rev}\) est le transfert d'énergie thermique reçu. La pression du gaz est reliée à \(T\) et \(V\) via \(pV=RT\) de sorte que \[ \delta Q^\text{rev}=\frac{RT}{V}\, \mathrm{d}V+C_v(T)\, \mathrm{d}T \] Il s'agit d'une forme différentielle. Vérifions l'égalité(4) : \[ \left.\frac{\partial (RT/V)}{\partial T}\right|_{V}=\frac{R}{V} \quad\text{alors que}\quad \left.\frac{\partial C_v(T)}{\partial V}\right|_{T}=0 \] ce qui suffit pour conclure que \(\delta Q^\text{rev}\) une différentielle totale exacte, contrairement à \(\mathrm{d}U(T)\), \(\mathrm{d}p(V,T)\) etc.

Ce qui distingue essentiellement une forme différentielle d'une différentielle totale exacte c'est son intégration : elle nécessite de connaître le chemin d'intégration dans le premier cas, alors que pour une différentielle totale exacte on a \[ \int_\text{A}^\text{B}\mathrm{d}f(x,y)=f(\text{B})-f(\text{A}) \] résultat qui ne dépend pas du chemin suivi pour aller de A vers B.

Différentiel d'ordre deux

Considérons une fonction \(f=f(x,y)\) de classe \(C^2\). Au voisinage de P\((x_0,y_0)\), les variations de \(f\) sont régies par le  : \[ f(x_0+h,y_0+k)-f(x,y)=\mathrm{d}f+\frac{1}{2!}\mathrm{d}^2f+(h^2+k^2)\epsilon(h,k) \] où \(\mathrm{d}^2f\) est la différentielle d'ordre 2. Pour une fonction de deux variables, on obtient \[ \mathrm{d}^2f=\left.\dfrac{\partial^2f }{\partial x^2}\right|_{y}\,\mathrm{d}x^2+ 2\dfrac{\partial^2f}{\partial x\partial y}\,\mathrm{d}x \mathrm{d}y+ \left.\dfrac{\partial^2f }{\partial y^2}\right|_{x}\,\mathrm{d}y^2 \]

\[ \begin{split} \mathrm{d}^2f &=\mathrm{d}\left(\left.\dfrac{\partial f}{\partial x}\right|_y\,h+ \left.\dfrac{\partial f}{\partial y}\right|_x\,k\right)=\mathrm{d}\left(\left.\dfrac{\partial f}{\partial x}\right|_y\right)\,h+ \mathrm{d}\left(\left.\dfrac{\partial f}{\partial y}\right|_x\right)\,k\\ &=\left.\dfrac{\partial^2f }{\partial x^2}\right|_{y}\,h^2+ \dfrac{\partial^2f }{\partial x\partial y}\,kh+\left.\dfrac{\partial^2f}{\partial y^2}\right|_{x}\,k^2+ \dfrac{\partial^2f}{\partial x\partial y}\,hk\\ \mathrm{d}^2f &=\left.\dfrac{\partial^2f}{\partial x^2}\right|_{y}\,h^2+ 2\dfrac{\partial^2f}{\partial xy}\,hk+\left.\dfrac{\partial^2f}{\partial y^2}\right|_{x}\,k^2 \end{split} \]

Dans le cas où l'approximation à l'ordre un donne un résultat nul, alors il faut prolonger le développement à l'ordre deux pour estimer une petite variation de la grandeur étudiée.

Exemple

Un cylindre voit son rayon \(r\) augmenter de 1% et sa hauteur \(h\) diminuer de 2%. Déterminons la variation relative de son volume. Une approximation linéaire nous a donné \[ \frac{\Delta V}{V}=2\frac{\Delta r}{r}+\frac{\Delta h}{h} \] ce qui donne zéro ici. Il faut donc prolonger le développement à l'ordre deux. Sachant que \(\mathrm{d}V=2\pi rh\, \mathrm{d}r+\pi r^2\, \mathrm{d}h\), on obtient \[ \mathrm{d}^2V=\left(2\pi h\, \mathrm{d}r+2\pi r \, \mathrm{d}h\right)\,\mathrm{d}r +(2\pi r\, \mathrm{d}r)\, \mathrm{d}h \] d'où \[ \mathrm{d}^2V=2\pi h\,\mathrm{d}r^2+4\pi r\, \mathrm{d}r\,\mathrm{d}h \] On en tire l'approximation \[ \Delta V\simeq \frac{1}{2}\left(2\pi h\,{\Delta r}^2+4\pi r\,\Delta r\Delta h\right) \] et en valeur relative : \[ \frac{\Delta V}{V}=\left(\frac{\Delta r}{r}\right)^2+ 2\left(\frac{\Delta r}{r}\right)\left(\frac{\Delta h}{h}\right)=-0{,}03\% \] Le volume diminue de 0,03%.

Points stationnaires

Si en un point P\((x_0,y_0)\), la différentielle d'ordre un de \(f\) est nulle, on dit que P est un point stationnaire ou critique de \(f\). Autrement dit, \[ \left.\frac{\partial f}{\partial x}\right|_{y}(x_0,y_0)=0 \quad\text{et}\quad \left.\frac{\partial f}{\partial y}\right|_{x}(x_0,y_0)=0 \quad\Rightarrow\quad \text{P est stationnaire} \] Dans ce cas, au voisinage de P, les variations de \(f\) sont régies par \[ f(x_0+h,y_0+k)-f(x,y)=\frac{1}{2!}\mathrm{d}^2f+(h^2+k^2)\epsilon(h,k) \] Du point de vue géométrique, la nature du point P dépend du signe de \(\mathrm{d}^2f\) :

Exemple de point col.
Exemple de point col.

Pour une fonction de deux variables, la différentielle d'ordre deux se met sous la forme \[ \mathrm{d}^2f= a\,\mathrm{d}x^2+2b\, \mathrm{d}x \mathrm{d}y+c\, \mathrm{d}y^2 \quad\text{avec}\quad \begin{cases} a&=\partial^2f/\partial x^2|_{y}\\ b&=\partial^2f/\partial x\partial y\\ c&=\partial^2f/\partial y^2|_{x}\\ \end{cases} \] dont le signe est déterminée par celui de \(a\) et celui du discriminant réduit \(b^2-ac\). On a \[ \text{P est un} \begin{cases} \text{minimum si}& b^2-ac<0 \text{ et }a>0\\ \text{maximum si}& b^2-ac<0 \text{ et }a<0\\ \text{point col si}& b^2-ac>0 \end{cases} \]

Exemple

Un industriel nous demande de concevoir une boite rectangulaire sans couvercle, de volume \(V=4\,\mathrm{m^3}\) sans préciser sa hauteur \(z\) ni les dimensions \(x\) et \(y\) de la base rectangulaire. Pour économiser de la matière nous allons déterminer quelles valeurs il faut donner à \((x,y,z)\) afin de minimiser l'aire de la boite.

La volume et la surface de la boite s'écrivent \[ x\,y\,z=4 \quad\text{et}\quad \mathcal{A}=2xz+2yz+xy \] Seules deux variables sont indépendantes. Choisissons les variables \((x,y)\). On peut substituer \(z\) par \(4/(xy)\) dans l'expression de l'aire : \[ \mathcal{A}(x,y)=\frac{8}{y}+\frac{8}{x}+xy \] Déterminons les dérivées partielles de la fonction \(\mathcal{A}(x,y)\) : \[ \left.\frac{\partial \mathcal{A}}{\partial x}\right|_{y}=-\frac{8}{x^2}+y \quad\text{et}\quad \left.\frac{\partial \mathcal{A}}{\partial y}\right|_{x}=-\frac{8}{y^2}+x \] Le point stationnaire s'obtient en annulant ces dérivées. On aboutit à deux équations \[ x^2y=8 \quad\text{et}\quad xy^2=8 \quad\text{d'où}\quad x=y=2 \] S'agit-il d'un minimum ? Pour cela calculons les dérivées secondes au point P\((2,2)\) : \[ \left.\frac{\partial^2\mathcal{A} }{\partial x^2}\right|_{y}=\frac{16}{x^3}=2 \qquad \frac{\partial^2\mathcal{A} }{\partial x\partial y}=1 \qquad\text{et}\qquad \left.\frac{\partial^2\mathcal{A} }{\partial y^2}\right|_{x}=\frac{16}{y^3}=2 \] On peut vérifier qu'il s'agit bien d'un minimum puisque \[ \left(\frac{\partial^2\mathcal{A} }{\partial x\partial y}\right)^2-\left.\frac{\partial^2 \mathcal{A}}{\partial x^2}\right|_{y}\left.\frac{\partial^2\mathcal{A} }{\partial y^2}\right|_{x}<0 \quad\text{et}\quad \left.\frac{\partial^2\mathcal{A} }{\partial x^2}\right|_{y}>0 \] Finalement on produira une boite de base carrée (2x2 m2) et de hauteur 1 m.

Pour en savoir plus...

  1. J. Roussel Conséquences mathématiques des principes[en ligne], 2024. Disponible sur femto-physique.fr
  2. J. Renault Techniques mathématiques de la physiqueParis, Dunod, 1994.